GAVI - The Global Alliance for Vaccines and Immunization

Pleins feux sur la vaccination

En bref - July 2003

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En première ligne : le point de vue du ministère de la Santé

En novembre dernier, à Dakar, au Sénégal, lors de la réunion des partenaires de GAVI, les ministres de la santé ont exprimé leur désir de voir la mise en place d'un forum pour échanger leurs expériences et des informations sur la vaccination. Dans cet article, nous commençons par demander à quatre ministres de la santé de présenter les défils et les problèmes principaux auxquels ils sont actuellement confrontés.

Anna M. Abdallah, Ministre de la Santé, Tanzania
©Lisa Jacobs

ANNA M. ABDALLA, MINISTRE DE LA SANTE, TANZANIA

« Tout repose sur l’engagement politique. Même une personne pauvre a des priorités. Au moment de notre indépendance, nous avons pris envers les gens de notre pays l’engagement d’accorder la priorité à la lutte contre les maladies. En Swahili, on dit « Kinga ni bora kuliko tiba », ce qui signifie « mieux vaut prévenir que guérir ». C’est pourquoi la vaccination occupe une si grande place dans notre programme de santé.

Nous avons constaté qu’il était très facile de travailler avec les ONG. En fait, nous travaillons en étroite collaboration avec des fournisseurs privés de services de santé, en particulier les hôpitaux et les dispensaires gérés par des missionnaires. Nous avons mis en place un programme dans le cadre duquel nous accordons des « subventions par lit » pour aider à payer les frais de personnel. Nous passons des contrats avec des organismes à but non lucratif afin de fournir des services essentiels comme la vaccination.

Nous venons de lancer un programme associant la vaccination à la prévention contre le paludisme. Nous avons acheté un million de moustiquaires traitées à l’insecticide et nous les donnons aux mères lorsqu’elles amènent leurs enfants pour leur troisième dose de DTC. Nous en distribuons aussi lors des campagnes de vaccination systématique porte-à-porte dans le cadre des Journées nationales de vaccination.

Face aux rumeurs parfois négatives sur la vaccination, nous avons été en mesure de changer les attitudes en oeuvrant au niveau des districts pour mobiliser les chefs des collectivités, y compris les guérisseurs traditionnels, de manière à diffuser les faits réels concernant la vaccination.

L’un des défis réside dans le fait qu’au sein de certains gouvernements locaux, on est peu conscient de ce que sont les soins de santé primaires. Nous cherchons donc à réformer le système pour qu’un plus ferme engagement soit pris au niveau local envers les soins de santé primaires. »

LESLIE RAMSAMMY, MINISTRE DE LA SANTE, GUYANE

« Le défi que représente l’achat des vaccins proprement dit est à présent relevé, grâce au soutien de GAVI et à un plus grand investissement de notre part. Ce que nous devons faire maintenant, c’est renforcer nos capacités à les administrer. Comme dans beaucoup de pays en développement, c’est aujourd’hui pour nous le plus grand défi. Nous devons nous attaquer à plusieurs problèmes.

Tout d’abord, la chaîne du froid. Un grand nombre des collectivités de notre arrière-pays ne sont pas alimentées en électricité. Avec l’aide de GAVI et de l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), la Guyane a mené une étude de sa chaîne du froid. Nous sommes en train de résoudre les problèmes, mais il nous faudra de l‘aide. Mettre en place une meilleure chaîne du froid est devenu pour nous une priorité, de même que la nécessité d’avoir des locaux centraux de stockage réfrigéré.

Deuxièmement, les ressources humaines. Pour assurer une couverture adéquate, il nous faut un assez grand nombre de personnels bien qualifiés. Or, nous formons des gens qui s’en vont ensuite dans les pays riches. Nous devons faire face à cela. Nous imposons pour l’entrée dans le secteur de la santé des conditions très strictes, et peut-être serons-nous amenés à les changer. Certaines personnes dans nos collectivités seraient peut-être en mesure de participer à la fourniture de soins de santé, même si cela implique d’enfreindre certaines règles bien établies. Il n’est pas nécessaire pour un programme de vaccination que tous les travailleurs soient des infirmiers ou infirmières qualifiés.

Troisièmement, nous devons convaincre les parents des avantages que présente la vaccination. Nous ne leur avons pas suffisamment montré les dangers des maladies qui peuvent être évitées grâce à la vaccination. Je suis en train d’établir des partenariats avec les collectivités, de publier des magazines montrant aux gens ce à quoi ces maladies peuvent ressembler et collabore avec des médecins.

Enfin, le gouvernement doit allouer encore plus d’argent pour la vaccination. Il ne faut pas oublier que le soutien de GAVI ne couvre qu’une partie seulement de notre programme national. C’est un pays à court d’argent. Nous devons sensibiliser les gens à tous les niveaux politiques pour qu’ils prennent conscience des dangers des maladies évitables, qui peuvent réapparaître à tout moment. »

MARIN KVATERNIK, MINISTRE, MINISTERE DE LA SANTE ET DE LA SECURITE SOCIALE DE LA REPUBLICA SRPSKA, BOSNIE-HERZEGOVINE

« Pour l’instant, le plus grand défi auquel nous sommes confrontés est posé par les répercussions des réformes de grande envergure entreprises dans le domaine de la santé en Bosnie-Herzégovine. Actuellement, nous avons deux ministères de la santé, un qui dessert la Republica Srpska et l’autre qui dessert la Fédération de Bosnie-Herzégovine, et leur structure organisationnelle est différente. Une fois que l’administration publique aura été réformée, ces problèmes se feront moins sentir.

La première réforme a concerné les soins de santé primaires. Avant le conflit dans notre pays dans les années 1990, le système de sécurité sociale permettait aux patients d’aller directement consulter un spécialiste. Maintenant, ils doivent passer par un intermédiaire : le généraliste. Ceci n’étant pas sans répercussions sur la clientèle des spécialistes, certaines associations de professionnels de la médecine s’y sont opposé, ce qui a entraîné une diminution des ressources mises au service du public au profit de la résolution des conflits.

Nous avons maintenant atteint la deuxième phase de réformes : modifier le fonds d’assurance maladie, élaborer un plan directeur pour la réforme des hôpitaux et réorganiser le Ministère de la Santé. Nous sommes confrontés à des problèmes classiques de gestion, comme celui des conseillers en gestion. A l’issue du conflit, 150 cabinets conseillaient le Ministère de la Santé. Nous disposons maintenant de 20 coordinateurs nationaux différents pour des questions de santé spécifiques : vaccination, tuberculose, VIH, diabète, maladies cardiovasculaires, santé génésique, tabagisme, etc. Nous allons modifier ce système de manière à ce que les coordinateurs soient tenus de rendre des comptes et chargés de conseiller le Ministère.

La bonne nouvelle, c’est que nos efforts visant à améliorer le fonctionnement du système sont en bonne voie.

Pagbajabyn Nymadawa
©2003 The Vaccine Fund

PAGBAJABYN NYMADAWA, MINISTRE DE LA SANTE, MONGOLIE

« Atteindre les enfants de notre pays qui n’ont pas été vaccinés présente pour nous des défis physiques difficiles à relever. Tout d’abord, la Mongolie est un très vaste pays à la population clairsemée, qui s’étend sur plus de 1,5 millions de km2, (superficie presque équivalente à la superficie conjuguée de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne, du Portugal, de la Belgique et des Pays-Bas). Sa population, elle, n’est que de 2,5 millions d’habitants environ. Ceci veut dire que le pays compte en moyenne 1,5 habitants par kilomètre carré. De plus, le climat est rude. Une grande partie du pays se trouve à haute altitude et les températures varient entre -40° C et 25° C. Mais les vaccins doivent malgré tout être administrés aux nourrissons au moment voulu, maintenus au frais l’été et protégés contre le gel en hiver. La gestion de nos services de vaccination revient relativement cher.

En fait, nous avons déjà accompli bien des choses en matière de vaccination. Nous avons éliminé la variole en 1939, quatre décennies avant le reste du monde. La couverture vaccinale est relativement élevée dans notre pays pour les vaccins disponibles dans le cadre du Programme élargi de vaccination, à savoir 90 %. Nous avons introduit le vaccin contre l’hépatite B en 1991, malgré des difficultés économiques, et depuis lors, avons immunisé plus de 300 000 enfants contre cette maladie.

Nous sommes un pays à faible revenu. Nous recevions dans le passé un soutien des anciens pays communistes. A la fin de cette époque, nous avons connu deux ou trois années très difficiles où les vaccins n’arrivaient pas. De 1995 à 2000, nous avons reçu un grand soutien du Japon, y compris tous les vaccins et certains stages de formation. La politique de la Mongolie consiste à investir dans la médecine préventive, et nous l’avons fait avec succès. Par exemple, lors de la flambée épidémique de diphtérie en Russie dans les années 1990, nous n’avons pas été touchés. Nous avons besoin d’hôpitaux plus perfectionnés, mais nous essayons de consacrer l’argent du gouvernement à la prévention des maladies. Nous avons maintenant une loi sur la vaccination qui exprime clairement la responsabilité du gouvernement pour ce qui est de vacciner tous les enfants. Cependant, il nous faudra des ressources supplémentaires pour pouvoir atteindre les enfants nomades et passer au vaccin conjugué DTC+HepB. Ceci réduirait de 150 000 le nombre d’injections chaque année, de même que nombre de visites auprès des familles nomades. Nous avons adressé une demande de soutien à GAVI et au Fonds mondial pour les vaccins dans le cadre de projet, mais comme notre couverture vaccinale et nos performances au niveau national sont relativement bonnes, nous ne bénéficions pas d’un soutien aussi important que certains pays où les taux de couverture vaccinale sont plus bas. J’estime qu’on devrait récompenser les bonnes performances. »

Interviews réalisées par Lisa Jacobs et Phyllida Brown

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